vendredi 31 octobre 2008


SILENCE !


"On dit encore que la nature, en nous donnant deux oreilles et une seule langue, voulut nous obliger à moins parler pour mieux entendre"
Plutarque


"Ceux qui parmi nous ont un héritage européen vivent dans "un monde de mots" qui leur paraît le réel ; mais parler ne veut pas dire pour autant que ce que nous communiquons par le reste de notre comportement n'est pas aussi très important."
Edward T. Hall


"Le sens n'a plus d'intérêt lorsque les sens fourmillent"
François Roustang




"Faire silence", "Garder le silence", "Silence !", "Chut !". N'y aurait-il pas quelque chose de précieux dans ces sifflements pour justifier une telle intimation ?


Un blanc, un vide, puis soudain une respiration, un nouvel espace pour écouter plus profondément ce qui est dehors, ce qui est dedans. S'ouvre alors un monde plus subtil, un peu comme si on passait de la grosse caisse au violon. La grosse caisse serait notre discours rationnel, les "il faut", les "je dois", suffisamment assourdissante pour masquer ce qui tente de s'exprimer au fond de nous. Le violon serait nos émotions, les "j'ai envie", les "j'ai besoin", "je désire", "j'aime...". Le silence nous parle. Il parle de nous, de nos peurs, de nos joies, de nos visions d'avenir et aussi de nos solutions.

Le silence est un outil précieux pour le coach. Son propre silence, celui du client, leur silence ensemble. Quand le Coach se tait, il se détourne de ses attentes, de ses savoirs. Il fait le vide et le calme à l'intérieur de lui-même pour offrir plus d'espace au client. Il écoute ce qui n'est pas dit et qui pourtant se traduit par un geste, par une distance, par un soupir... Le Coach est disponible à ce que se joue en lui, dans la relation et dans le monde de son client. Il navigue entre ces univers pour entrer dans le sentir et le ressentir.

Selon Andy Rankin (The use of Silence in Coaching, EMCC 2008), le silence du Coach est une invitation à l'émergence mais aussi :

- un moment de quiétude -aussi court soit-il- en rupture avec l'agitation et l'urgence de la vie ;
- un temps offert au client pour explorer à son rythme le problème qui lui tient à coeur ;
- un espace pour entrer en contact avec ses pensées inconscientes ;
- une chance pour contacter son "être véritable" ;
- une voie pour trouver seul sa solution.

Malgré toutes ses promesses, l'exercice n'en est pas moins difficile. Il s'agit de lâcher prise sur ce qui le reste du temps nous tient : notre discours conscient, nos idées bien calibrées, la maîtrise appliquée de ce que nous donnons à voir aux autres, de l'enjeu qui nous lie. Quitter l'habitude des pleins pour explorer les vides qui peuvent alors se remplir et vider le trop-plein.

Pour conclure, je vous propose de vous laisser tenter par une minute de silence ou par l'exercice suivant :



Exercice de sensibilisation à l'écoute
(Jacques Bonhomme - Chef de Choeur et musicothérapeute)



Installez-vous en position verticale debout ou assis (le dos bien droit). Percevez votre langue dans un état d'immobilité totale (vous pensez "ma langue est dans une immobilité parfaite"). Restez quelques instants ainsi et observez l'immobilité de la langue... la conscience posée sur votre langue. Votre mental ne prononce plus aucun mot au bout de quelques minutes.

Placez maintenant un "o" dans votre expir (l'expiration), que vous chantez sans rien chercher d'autre qu'à laisser aller votre son jusqu'au bout de votre expir. A la fin de l'expir, fermez le son en prononçant la consonne "m" (mmmmmm et non "Aim").

Ecoutez maintenant le silence qui suit votre chant. Il est déjà perceptible à l'intérieur de vous-même. Recommencez plusieurs fois à laisser aller un son à différentes hauteurs et écoutez en vous-même le silence qui suit. Vous vous apercevrez alors que le son est générateur de silence.




Silence

Lancinante absence des mots qui dansent,
Fascinante présence des sens encensés.
Sens qui réveillent l'inconscience de nos idées délaissées
Donnent naissance aux jouissances de nos corps libérés.
Silence on pense !
Silence on panse !


Nathalie Vogelsinger-Martinez








lundi 13 octobre 2008




Humour et Coaching ?



"Je me suis mis à la clarinette c'est ce qui rapproche le plus de l'anglais"
Raymond Devos


"Le verbe aimer est difficile à conjuguer : son passé n'est pas simple, son présent n'est qu'indicatif et son futur est toujours conditionnel."
Jean Cocteau



Peut-on parler d'humour au pays de la "Saudade" sans paraître provocateur ou insolent ? Sommes-nous tenus d'être mono-bloc, mono-identité, mono-compétence ? Doit-on choisir entre être drôle et être sérieux ? N'y aurait-il pas un endroit ou tout se mélange et devient surprenant ? Opérant ?

A chacun sa réponse. Pour ma part, j'ai choisi de conjuguer à tous les temps, tous les tons, tous les lieux, des larmes aux éclats de rire, de la profondeur à la légèreté, du corps aux images, de la rigueur à la fantaisie, de la philosophie à la bande-dessinée. Pourquoi choisir devant tant de richesses et de possibilités ?

Quand un client vient voir un Coach, il attend de lui quelque chose d'inédit, quelque chose qu'il n'a pas déjà tenté puisqu'il n'y a pas d'utilité à refaire ce qui ne fonctionne plus. Ce n'est pas une décision facile ni confortable que de se tourner vers autrui. En soi, c'est pourtant la première innovation (le jour ou le "jamais" devient "pourquoi pas ?"). C'est prendre la décision de se mettre au centre de ses choix, prendre la responsabilité de son importance, s'arrêter le temps d'observer son univers d'un peu plus loin et se regarder pour savoir si on se reconnaît dans tout cela (et voilà le deuxième pas !). Bien sûr, on ressent de la souffrance à se voir impuissant et cependant désirant, de faire le constat que certaines blessures sont encore douloureuses et qu'elles se réveillent quand et où on ne les voudrait pas. Il n'y a pas vraiment de quoi rire... Justement.

L'humour est une façon d'offrir de l'inédit, de l'imagination, du décalage, du recadrage, un autre espace, une nouvelle respiration, une ACTION. Rire c'est revenir au présent, au vivant, à la joie de sentir tout cela. Bien sûr, il s'agit de reconnaître ce qui blesse encore et son intensité mais nous ne sommes pas pour autant contraints de nous laisser aspirer par le registre de la plainte qui nous entraîne vers les terrains que nous connaissons si bien et qui, à cause de cela, nous réconfortent au moins de ce que nous maîtrisons leur chanson triste, celle qui légitime notre inaction. La plainte, c'est cela ! Elle nous prend tout notre souffle et nous laisse épuisés. Alors, quelle claque sympathique que l'humour qui nous fait considérer notre propre désarroi comme une dérision face à tout ce que nous propose notre vie, tout ce qui nous est ENCORE possible.

"Par son souverain mépris des limites de la logique et de la rationalité, le mot d'esprit peut faire voler en éclats les images du monde et devenir ainsi l'agent du changement", Paul Watzlawick.

Rire c'est prendre du recul pour se regarder en spectateur de sa propre vie , prendre de l'élan pour se projeter dans celle que nous souhaitons. Et nous voilà à des hauteurs qui nous grisent, les situations douloureuses s'éloignent pour n'être plus réduites qu'à leur place dans notre passé... dépassées. Rire c'est soudain se sentir d'autres traits, un visage qui change et qui enfin nous plaît, redécouvrir la joie, l'envie et l'énergie, c'est faire éclater ce qui nous emprisonne. Rire entre chimie et magie, pourquoi pas ?

Rien à voir avec se moquer de l'autre ou de soi. C'est se rappeler que nous ne sommes que des hommes pris au piège des histoires qu'ils se racontent sur eux-mêmes. Nous avons le moyen de nous raconter d'autres histoires, celles qui court-circuitent notre rationalité quand elle nous dessert (sans délice !). Ces nouveaux récits nous font entrer dans un monde à explorer où nos souvenirs prennent des formes plus confortables et nous poussent vers un avenir joyeux. Nous ne perdons rien de ce vers quoi nous voulons aller, quelque soit le sérieux de notre objectif. Au contraire, nous gagnons en énergie et en légèreté.

En Coaching , le sérieux réside dans le cadre professionnel que l'on pose et dans l'authenticité, l'honnêteté avec laquelle on avance au sein de la relation. Une fois cela sécurisé, alors l'humour peut prendre sa place comme un levier puissant du changement. A ne pas négliger, c'est bien plus amusant !




Nathalie Vogelsinger-Martinez
( l'Oiseau chanteur)


A voir à Lisbonne
Os Ridiculos : desenho humoristico e Censura (1933-1945), Bedeteca de Lisboa, R.Cidade de Lobito, Palacio do Contador-Mor, Olivais Sul. Até o 31 Dezembro 2008



lundi 6 octobre 2008




Le métier de Coach : des standards européens
European Quality Award (EMCC)




"Pour sortir, il faut utiliser la porte. Pourquoi personne n'utilise-t-il cette porte ?"
Confucius




1) Le client attend de l'information, de l'efficacité et de la sécurité

Toute personne sensée vous dira qu'aucun diplôme, qu'aucune certification ne peut garantir la capacité qu'une personne a à aider autrui. Il y a là quelque chose qui ne se saisit pas, qui ne se mesure pas et qui ne s'apprend pas et pourtant...

Toute personne un peu informée sur les métiers de l'accompagnement vous dira que dans un processus de changement interviennent quatre types de facteurs (source Médiat-Coaching) :

- des facteurs extra-thérapeutiques (40 %) liés aux compétences internes du client
- des facteurs relationnels (30 %) en rapport avec la qualité relationnelle entre le client et son interlocuteur
- des facteurs placebo (15 %) comme les espoirs et l'attente du client
- des facteurs liés au modèle et à la technique -ici le Coaching- (15 %)

C'est ce cocktail de facteurs qui permet au client d'avancer.

Oui ! Le plus puissant pouvoir de changement est du côté du client alors pourquoi ne change t-il pas lui qui veut tant changer ? Quand un client vient voir un coach c'est parce qu'il a besoin d'un interlocuteur pour activer tous les autres facteurs nécessaires au changement qu'il souhaite. Il attend de la part du Coach entre autre un certain savoir sur les outils, une certaine sécurité sur la relation, une certaine efficacité.

Toute personne un peu exigente pour elle-même vous dira également qu'elle préfère être entre les mains d'un professionnel parce que c'est rassurant et nécessaire de déposer ce qui nous est de plus précieux entre les mains de quelqu'un qui connaît son métier, ses limites et qui évitera de vous utiliser pour soigner ses propres malaises ou pour satisfaire ses fantasmes de pouvoir sur autrui. Le client attend de la sécurité.

C'est pour répondre aux trois demandes légitimes du client que sont l'information (Comment pouvez-vous m'aider ? Quels sont vos outils ? Quelles sont vos méthodes ? Sur quelles théories vous appuyez-vous ?), l'efficacité (En quoi allez-vous m'aider ?) et la sécurité (Quelles sont les limites de votre intervention ? Quelle est votre éthique ? A qui rendez-vous compte ?) que le métier de Coach doit s'organiser.

Depuis une dizaine d'années (le Coaching a 40 ans) deux principaux organismes ont émergé : l'European Mentoring and Coaching Council (EMCC) et l'International Coaching Federation (ICF). Je parlerai ici principalement de l'EMCC dont je suis membre.



2) L'European Mentoring and Coaching Council (EMCC) : une organisation pan-européenne

Le Coaching existe depuis 40 ans aux Etats-Unis, 20 ans en France et 5 ans au Portugal. Il connaît un succès croissant dans les entreprises et auprès des particuliers. Il n'existe pas à proprement parler d'organisme "officiel" qui régule le métier de Coach. La réalité est donc un ensemble de Coachs dont certains répondent aux exigences du métier partagées par un grand nombre de professionnels (expérience de l'entreprise, parcours de certification complet, supervision régulière, formation continue, travail en réseau...) et d'autres qui sont des Coachs auto-proclamés dont il est difficile a priori d'évaluer le processus d'intervention. La réalité du Coaching renvoie également à celle de tous les métiers et on y trouve la même proportion de passionnés, de talentueux, d'égarés et d'incompétents.

L'European Mentoring and Coaching Council (EMCC) est une organisation qui regroupe toutes les parties (écoles de formation, superviseurs, clients, chercheurs...) dont l'intérêt est de promouvoir la qualité et le développement du Coaching et du Mentoring. L'EMCC est présent à travers ses membres dans 33 pays (Angleterre, France, Allemagne, Irlande, Danemark, Suisse, Suède, Turquie...)

Sous la pression des professionnels du Coaching et des clients, l'EMCC a mis en place un processus d'accrédition des Ecoles de Formation de Coachs.


L'European Quality Award : un référentiel métier

L'"European Quality Award" attribué par l'EMCC est une accréditation. Elle valide le cursus de formation et de certification des Ecoles de Coaching. Les écoles accréditées (2 en France dont Médiat-Coaching qui a reçu le niveau "practicioner", le plus élevé pour des coachs) dispensent des formations qui permettent d'acquérir les 11 compétences au coeur du métier de Coach.

Les 4 niveaux d'accréditation sont :
- "Foundation" 3 et 4
- "Intermediate"
- "Practitioner"
- "Master Practitioner" (réservé aux superviseurs)

Le niveau "Practitioner" valide notamment les compétences du coach en relation avec :

- les croyances et les attitudes (socle théorique, valeurs personnelles, sens de l'engagement...) ;

- le travail sur soi tant personnel que professionnel (développement personnel du Coach, supervisions, formation continue, séminaires, travail en réseau, activités autres...) ;

- la capacité à se situer et à évoluer au sein du monde du Coaching et du Mentoring (Quelle est ma spécialité ou mes spécialités ? , Quels sont mes clients ? Quelles sont les limites que je me pose ?...) ;

- les capacités de communication ;

- les compétences techniques ("boîte à outils" : connaissances en psycho-pathologie, tests de personnalité, outils de développement personnel ...) ;

- les connaissances dans le champ du développement des personnes ;

- les connaissances dans le champ de la psychologie de la communication ;

- l'aptitude à définir les bases contractuelles du programme de Coaching...



4) Le Coaching au Portugal
Alexandra Barosa-Pereira, post-doctorante e "Mestre em Psicologiea do Desenvolvimento Profissional" à l'Université d'Evora fait le point sur le Coaching au Portugal dans son livre très complet "Coaching em Portugal". Elle décrit un monde professionnel du Coaching qui cherche sa voie et appelle à une professionnalisation du métier via des organisations européennes régulatrices.

Il y a à peu près 150 Coachs au Portugal dont un certain nombre sont membres de l'ICF. Le 3 octobre 2008, l'ICF a pris l'initiative d'organiser à Lisboa le "1° Encontro nacional de Coaching" qui réunissait une cinquantaine de Coachs et de personnes intéressées par la profession.

L'exercice s'est révélé une opération d'auto promotion des protagonistes et organisateurs mais également la première occasion de parler clairement et simplement de "Qu'est-ce que le Coaching ? Comment cela marche t-il ?". A ce titre, l'évènement est à saluer.

En ces moments de crise où chacun touche les limites de l'autorégulation des marchés et s'interroge sur la place qu'il faut rendre à l'humain, le Coaching a de fabuleuses cartes à offrir tant aux organisations qu'aux individus. C'est un outil puissant et il requiert pour son maniement un Coach dont la posture est professionnelle, un Coach qui s'interroge sur le sens de son métier, le rôle qu'il joue dans l'organisation, dans la relation, sur son éthique et sur ses limites. Si ce Coach n'est pas seul, s'il appartient à un réseau, si il est supervisé alors il apporte du confort et de la sécurité à son client. C'est à l'intérieur de ce cadre, qu'ensemble ils pourront en pleine confiance être créatifs et esquisser de nouveaux comportements.

Au delà de toutes ces considérations, il reste une évidence, un BON coach est celui avec lequel on a envie de travailler et d'avancer.



Nathalie Vogelsinger-Martinez
Coach certifiée Médiat-Coaching
Membre de l'European Mentoring and Coaching Council
Supervisée régulièrement - Membre du réseau de Coach Internationaux Médiat-Coaching